La Compagnie des Mines de Douchy

Le 7 janvier 1907, Georges Hippolyte épouse à Saint-André-Lez-Lille Marie-Thérèse Debeugny. Pourquoi se marient-ils dans cette commune du Nord alors que les parents de Georges habitent à Bapaume et ceux de Marie-Thérèse à Itancourt ? Avant son entrée à la Compagnie des Mines de Douchy, Georges travaillait depuis le 10 mars 1904 pour les établissements Kuhlmann dont le siège social se trouvait à La Madeleine-lès-Lille. Une usine a été ouverte à Loos-lès-Lille en 1825, à La Madeleine-lès-Lille en 1847, à Amiens et à Saint-André-Lez-Lille en 1852. Probablement qu’il travaillait dans l’usine de Saint-André-Lez-Lille, bien qu’aucun document en notre possession ne puisse l’affirmer. À cette époque, les établissements Kuhlmann s’appelaient “Manufacture des produits chimiques du Nord”. Afin de poursuivre l’activité malgré l’occupation du Nord pendant la Première Guerre mondiale, d’autres usines seront implantées hors de la zone de conflit.

Georges quitte les établissements Kuhlmann et entre à la Compagnie des Mines de Douchy le 1er juin 1908. Le couple s’installe à Lourches dans un logement mis à sa disposition par la Compagnie qui exploite le charbon dans les communes de Lourches, Douchy-les-Mines, Haulchin et Rœulx. Georges est attaché au service commercial de la Compagnie. En 1901, la Compagnie des Mines de Douchy met 17 maisons à la disposition de ses agents et 915 maisons à celle des ouvriers, groupées en une cinquantaine de corons.

95- Lourches janvier 1914
Lourches en janvier 1914
(photographie sur plaque de verre, collection de Georges Hippolyte)

À Lourches, il y a quatre mines : la mine Schneider, la mine Saint-Mathieu, la Naville et l’Éclaireur.

96- Lourches fosse Schneider
La fosse Schneider
(carte postale, collection de Georges Hippolyte)

La fosse Schneider ou Paul Schneider est ainsi nommée en l’honneur du président de l’époque qui avait pour premier vice-président Charles Derôme, pour second Charles Boca et Charles Maniez comme secrétaire. Elle reprend de l’activité en 1907, plus profondément, grâce aux nouvelles technologies. Elle devient la plus importante fosse de la Compagnie. Avant cette date, elle s’appelait fosse Sainte-Barbe et avait été abandonnée en 1886 par épuisement du gisement.

97- Chevalet
Un chevalet
(photographie, collection de Georges Hippolyte)
98- Fosse
Une fosse
(photographie, collection de Georges Hippolyte)
98- P W sa remonte du fond
P. W. à sa remonte du fond
(photographie, collection de Georges Hippolyte)

En novembre 1908, la Compagnie des Mines de Douchy se réorganise et Georges devient le chef du service commercial et des approvisionnements. Sa nomination fait l’objet d’une délibération le 13 octobre 1908.

99- Mines Douchy CA 13 octobre 1908

Art. 7 – Monsieur Brugneau, receveur de la Cie, devant cesser ses fonctions le 1er novembre 1908, le Conseil décide :

1 – Que l’ancien service de la recette sera, à partir du 1er novembre 1908, scindé en deux services distincts : Service commercial et des approvisionnements et Service de la comptabilité. Le premier de ces services aura à sa tête Monsieur Georges Hippolyte, ingénieur attaché au service commercial, qui est nommé chef du service commercial et des approvisionnements. Le second sera dirigé par Monsieur Albert Potel, actuellement contrôleur à la Cie, qui est nommé chef du service de la comptabilité.

2 – Qu’en cas d’empêchement de Monsieur le directeur gérant, la signature de celui-ci, sur les bordereaux d’effets à remettre à l’escompte ou à l’encaissement, l’endossement de tous effets, les billets à ordre, lettres de change, chèques et mandats, sera remplacée par les deux signatures du chef du service commercial et des approvisionnements et du chef du service de la comptabilité.

Par délibération du conseil d’administration en date du 25 février 1908, Monsieur Albert Potel a déjà la délégation de signature. À partir du 1er novembre 1908, Monsieur Georges Hippolyte signera en remplacement de Monsieur Brugneau.

Étaient présents : M. M. Boca, Maniez, Mathieu, Namur, Bultot, Jacques Schneider. Pour extrait conforme, l’ingénieur directeur gérant.

En conséquence, à partir du 1er novembre 1908, Monsieur Georges Hippolyte signera comme ci-dessous :

100- Mines Douchy signature GH

La Première Guerre mondiale vient bouleverser les pratiques professionnelles. Les mines de Douchy sont bombardées, pillées, les installations dévastées.

« Permettez-moi de vous informer de ce qui s’est produit du 25 août au 3 septembre. Le 25 dans la journée, on aurait cru le lundi de Pâques, jour de la braderie de Denain. Il y avait un monde fou dans la Grand’Rue. D’abord, ceux qui venaient du côté de Denain et qui fuyaient, et aussi tous les Lourchois qui sortaient de chez eux pour voir ce défilé. […] À la fosse Saint-Mathieu, le poste était sur le pavé et un moment, une auto n’arrêtant pas de suite, les fusils furent braqués. En deux secondes, la rue était vide ! […] Le soir du 25, à 9 heures, les postes partaient de leur propre initiative et ils ont bien fait. Celui de la fosse de Rœulx avait été oublié et a été prévenu à temps par Auguste Héraut, vers minuit. À 3 heures du matin, des uhlans étaient massés au pont de la gare de Lourches et l’un d’eux était descendu par un garde civil. On a fait disparaître le corps. À 7 heures, la danse s’amorçait, les vélos et les uhlans affluaient sans relâche jusqu’à midi. […] Par exemple, le 26 vers 9 heures du soir, l’infanterie débarque et le coron de l’église, rue de la Mairie et rue du Vieux Lourches, est rempli. On couche chez messieurs Clément, Quiquempoix, Parent, tous quoi. Ch. Cartigny couchait chez ses parents, alors naturellement, tout est enfoncé et saccagé après la découverte d’un révolver. Aussi bizarre que cela paraisse, j’ai dormi comme une souche et n’ai rien entendu, sauf de 10 heures à minuit, pendant que l’artillerie défilait rue de la Place Dominique… pour aller se ficher dans la houille ! Ce sont des demi-tours pour repartir par le Vieux Lourches. […] Doise, le garçon pharmacien a mal dormi, il a manqué d’être fusillé. Il s’était réfugié en face et a prétendu être le fils. La maison de monsieur Cousin a été détériorée. Les jours suivants ont été paisibles, les convois ne circulaient que sur la grand’route. Au bureau, on a fabriqué un abri pour les registres, copies de lettres et autres pièces, en murant le second four à chauffer, vous savez, dans le fond de la cave. […] Paniez, de ma classe, venu au cours au stand, a été tué, ainsi que Gustave Cady, fils du chef de carreau. Parti avec moi, il était au 87e et a été tué le 2 décembre. Et combien d’autres : les deux fils Belle, rue du Rivage ; Dupas, le fils du pareur ; Ravez, estaminet sur la place, etc. » 27 mars 1915, extrait de la lettre de Parfait à Georges.

« Nos postes sont en activité. On maintient nos travaux souterrains en état (entretien) avec les galibots et les ouvriers mobilisables qui n’ont pas pu se sauver et les vieux. Il est fait l’extraction nécessaire pour les besoins de nos installations et le chauffage du personnel qui ne doit user du combustible qu’avec la plus grande modération. Une partie de nos usines est maintenue en activité. Monsieur Thiéry, madame et ses enfants, sont restés là-bas. Il a été fait des échanges de combustibles contre des pommes de terre avec des cultivateurs de la région, que monsieur Thiéry a fait distribuer aux grandes familles de la Compagnie. » 6 avril 1915, extrait des notes de Jules Collier envoyées à Georges.

« Messieurs Théodore Mathieu, Adolphe Mouton, Clabecq, Jules Collier, sont à Paris. Émile Legrand et Tripet qui avaient été ajournés au conseil de révision ont été réexaminés et déclarés aptes, ils sont actuellement à La Souterraine (Creuse). Alfred Bertiaux a été blessé le 25 août par un éclat d’obus, il est guéri et fricote depuis deux mois à son dépôt. François Poirette a été blessé dans une charge à la baïonnette, il doit rejoindre le front sous peu. Albert Potel a été blessé. Gustave Cady, fils du chef de carreau de Schneider, a été tué. Il était élève à l’École des maîtres mineurs de Douai et vous l’avez certainement vu plusieurs fois aux séances de préparation militaire à Lourches. » 16 mars 1915, extrait de la lettre de A. Basquin à Georges.

Ces hommes ont composé à un moment donné le conseil d’administration de la Compagnie des Mines de Douchy, extrait d’un carnet de Georges Hippolyte avec leurs adresses : Charles Boca, président ; Paul Schneider, président honoraire ; Charles Maniez, vice-président ; Jules Mathieu, vice-président ; Paul Bultot, secrétaire ; Jacques Schneider, administrateur ; Henri Portier, administrateur ; Paul Coppin, commissaire des comptes ; Georges Haussy, commissaire des comptes ; Charles Boca fils, commissaire des comptes.

Laisser un commentaire